Ce que disent leurs mains : Léon Blum

Article paru dans L’Intransigeant du 15 octobre 1925 :

CE QUE DISENT LEURS MAINS

M. LÉON BLUM

La main de M. Léon Blum, encore qu’on y peut lire un grand besoin de mouvement et une énergie intense, est une main de philosophe plutôt que d’un homme d’action, la main d’un musicien qui a manqué sa vocation et d’un homme de lettres fortuitement plongé dans la politique. Elle est inépuisable en surprises.
La combinaison astrale Lune-Saturne-Mercure lui confère la lutte entre l’activité et la contemplation. Les doigts investis du nœud philosophique révèlent ce goût de la contradiction dans le domaine mystico-religieux, ce doute congénital qui doute de tout et même du doute, et cet esprit critique qui examine minutieusement le moindre fait et la plus anodine des théories. Le pouce indique la volonté diplomatique, allant jusqu’à l’obstination raisonnable.
Mais le trait dominant qui se retrouve dans la ligne de tête fourchue et les doigts flexibles est une merveilleuse souplesse de l’intelligence, une adaptabilité aux opinions les plus divergentes, une compréhension si parfaite des doctrines les plus contraires aux siennes qu’après avoir fait le tour d’une question, après avoir épuisé jusqu’aux subtilités casuistiques, tous les arguments positifs et négatifs, M. Blum, lorsqu’il se repose de critiquer, en vient à sympathiser avec les antipodes, sans toutefois adopter aucune de leurs idées. Il y a là dedans un dédoublement curieux de la personnalité.
M. Blum est orgueilleux et timide, comme la plupart des orgueilleux. Il aime l’ordre à condition de n’être pas obligé de ranger lui-même.
Sa carrière due à son mérite personnel est bien tracée, promet maint honneur, mais comporte le danger qui menace tous les êtres à grande vitalité nerveuse, celui d’éparpiller ses forces dans mille un domaines différents et irréconciliables.

Maryse Choisy

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