1932 : Le Veau d’Or, reportage-roman

Publié en 1932 aux Éditions de la Nouvelle Revue Française, collection « Les Livres du Jour ».
264 pages.

Ouvrage dédié « A Monsieur le Président Édouard Herriot ».

En exergue, une explication de Maryse Choisy sur le genre « reportage-roman » et une citation d’Édouard Herriot.

Table des matières :

CHAPITRE PREMIER : Le temple de la vraie foi
CHAPITRE II : Le temple du plaisir
CHAPITRE III : Le temple de la vérité
CHAPITRE IV : Sir Herbert Silberstein
CHAPITRE V : Le temple du snobisme
CHAPITRE VI : Une tournée de grand-duc de la finance
CHAPITRE VII : Louis Brutinel ou l’histoire financière des trente dernières années
CHAPITRE VIII : L’arrestation de Séraphin Bayle
CHAPITRE IX : Nuits sans sommeil
CHAPITRE X : Le temple du jeu
CHAPITRE XI : Les tribulations d’un empereur du milieu
CHAPITRE XII : La confusion des langues
CHAPITRE XIII : Le renard aux abois
CHAPITRE XIV : Crépuscule d’or
CHAPITRE XV : Paris sex-appeal

Le livre et la critique :

  • ? in L’Œil de Paris n° 163, 19 décembre 1931, p. 10 :

Tandis que Frédéric Lefèvre multiplie les Une heure avec…, Maryse Choisy poursuit triomphalement ses Un mois chez… Présentement, elle séjourne parmi les banquiers. Cela va nous valoir de piquantes révélations. Après les fauves, les requins. Espérons qu’ils ne mangeront pas, eux non plus, la dompteuse.
Celle-ci a fait son apparition en Bourse. C’est un événement, car on sait que l’accès du temple est interdit au sexe réputé faible. Mais Maryse Choisy a pris soin d’user d’un travesti masculin tout comme lorsqu’elle alla visiter le Mont Athos. Escortée de quelques intimes, elle a ainsi secrètement forcé la place, allant jusqu’à se faire photographier, carnet en main, auprès de la corbeille !
Quand femme veut…

  • Benoît Bénin in L’Œil de Paris, 16 août 1932, p. 12 :

Ce nouveau livre de Mme Maryse Choisy ne manque certes pas de courage. Quelques scandales financiers récents y sont évoqués, ainsi d’ailleurs que les vices, méfaits et crimes permanents de certains milieux financiers. Au point de vue purement littéraire, l’ouvrage a moins de valeur. Chaque page ou presque rappelle : 1° que l’auteur vient d’être mère ; 2° qu’elle fut l’amie de M. Joseph Delteil pour qui elle a gardé une grande admiration ; 3° qu’elle collabora au journal de Mme Hanau, etc. Il n’est pas un détail de sa vie qui ne lui ait inspiré quelques lignes. Ce défaut est d’ailleurs assez féminin. Des passages très savoureux, d’autres mordants prouvent néanmoins que Mme Maryse Choisy ne manque point d’un certain talent. Mais pourquoi avoir dédié son livre à M. Edouard Herriot ?

  • Françoise Verdier in L’Africain n° 128, 26 août 1932, p. 7 :

Maryse Choisy, la plus audacieuse de nos femmes de lettres, est l’auteur des reportages les plus sensationnels. Elle a passé « Un mois chez les hommes », « Un mois chez les filles », « Un mois chez les bêtes », voilà qu’elle a passé aussi un mois ou plus parmi les financiers.
On sent qu’elle a beaucoup écouté, beaucoup observé… et aussi beaucoup retenu. Ce monde de la finance, si mystérieux, si plein d’autorité, on dirait qu’elle en a pénétré les secrets, et elle ne laisse pas de nous en dévoiler quelques-uns dans un style chaud et brutal, qui a quelque chose d’inquiétant, de sympathique comme l’auteur elle-même.

  • Ch. Bourdon in Revue des Lectures n° 9, 15 septembre 1932, p. 1042 :

I. — Romans mauvais, dangereux ou inutiles pour la généralité des lecteurs. — Maryse CHOISY, Le Veau d’or, Nouvelle Revue française. […]
Mme Maryse Choisy, dont on connaît les singuliers reportages, vient de publier un « reportage-roman » qui a plus de prétentions et a demandé plus d’étude, Le Veau d’or.
Sous couleur de peindre les milieux financiers, elle a esquissé le portrait, ou plutôt la charge, de banquiers et de politiciens connus, auxquels elle a généreusement prêté les pires malhonnêtetés et les mœurs les plus abominables.
Ne désignant ses tristes héros que sous des sobriquets de son choix, elle a pu accumuler sur quelques têtes bien choisies toutes les ignominies.
C’est proprement immonde. Cela dépasse tout ce qu’on peut imaginer. Comment une femme peut-elle, ose-t-elle ?
« On doit le même outrage, disait-on jadis en vers pompiers, aux femmes sans pudeur qu’aux hommes sans courage ». Que dire d’une femme qui trempe sa plume dans de telles ordures ?
Or, le livre est partout en vente. Et il ne se trouvera personne, en France, ni parmi les parlementaires, ni parmi les pères de famille, pour en exiger l’interdiction immédiate…

  • F.R.D in La Semaine à Paris, 16 septembre 1932, p. 34 :

Mme Maryse Choisy est intelligente et sensuelle : l’émoi de la finance devait l’attirer. Et voici un ouvrage remarquable dans le dédale de la Bourse et les arcanes des grands financiers. Bréviaire d’aujourd’hui. Rythme, halètement des millions qui passent, des maisons qui sautent. Une passion : l’argent, et sa course facile. La chute est facile aussi. Maryse Choisy fait œuvre d’excellent journaliste.

  • Paul Martignon, in L’Archer n° 9, novembre 1932, p. 357 :

A part quelques esprits timorés qui pourront trouver dans ce nouveau roman de Maryse Choisy des pages ou des mots un peu raides, Le Veau d’or suscitera de réelles curiosités. Ce n’est pas à proprement parler un roman écrit selon le « Codex » littéraire. Plutôt une suite de tableaux agencés par des traits d’union assez factices ; kaléidoscope des gens de la finance, de la politique, une vue d’ensemble sur les grands problèmes dits internationaux et qui se résument à des batailles cruelles entre gros financiers. On reconnaît au passage des noms connus, très parisiens, très cosmopolites… L’auteur n’a pu les désigner par leur nom, mais le suicide de Silberstem, de la sociétaire Reyna, la détention arbitraire — paraît-il — de Mme Ponod, rappellent des événements récents.
Mais ce que l’on trouvera dans le Veau d’or, c’est le sens aigu, ironique et subtil d’observation, c’est surtout une langue claire, imagée, brutale comme un coup de gong. Ce roman fait songer à Zola et à Dostoïewski, dit le communiqué. A Zola, peu, le style de Mme Maryse Choisy est infiniment plus léger ; au romancier russe, davantage, car toutes ces figures d’une humanité riche et sadique ne sont pas belles. C’est un livre infiniment triste, infiniment vrai… hélas !

  • John Charpentier in Mercure de France n° 845, 1er septembre 1933, p. 417-418 :

Il est abondamment question de maisons closes dans Le Veau d’or, par Mme Maryse Choisy ; et pourtant, les personnages de ce livre, des sommités de la phynance, comme disait le Père Ubu, devraient avoir les moyens de s’offrir des distractions moins démocratiques. On sait (par un précédent ouvrage) que l’auteur connaît bien ce dont elle traite ; mais elle en traite avec l’effronterie intarissable qui, le plus souvent, est un gage d’incompétence. Elle entre comme un âne dans un moulin dans le plus intime des personnalités les plus fermées à la curiosité qui soient et les mieux défendues. Elle pose pour les gros mots et l’image obscène, comme les ingénues qui jouent les rouées et routières afin de vous tirer l’œil. Ce défaut, superposé aux tics professionnels de la journaliste : épithète exagérée pour forcer l’attention, puissance à systématiser un ensemble, clarté qui n’est que bavardage superficiel, font d’elle une piètre romancière. On voit vaguement le financier Brutinel triompher du financier Silberstein et le contraindre à se suicider en se laissant tomber d’un avion (nous connaissons cela), puis se trouver si sot de n’avoir désormais nul travail l’occupant, qu’il se réfugie contre l’ennui dans les lieux de délices précités. Noms et incidents à clef, ou qui voudraient bien qu’on les crût à clef. Une Mme Pernod intervient là dedans avec l’à-propos du cheveu dans la soupe ; et, autant que j’aie compris, nous, gens de peu, devrions lui tresser des couronnes parce qu’elle tentait de nous libérer de la féodalité des banques qui, du reste, va mourir (pas moins). Il vaudra mieux que Mme Choisy s’en tienne, dorénavant, aux reportages, si elle ne veut pas perdre le petit renom qu’ils lui avaient gagné.