Les plagiaires honteux

Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 35 (16 avril 1936) :

LES PLAGIAIRES HONTEUX

Aujourd’hui nous reproduisons, une fois de plus, la citation d’un journal qui s’est inspiré d’un article de J. B. dans CONSOLATION et qui a tu ses sources avec la discrétion qu’un galant homme emploie pour ses amours.
Avec l’exception de Huguette Garnier, auteur de tant de beaux livres et collaboratrice du JOURNAL, que son grand et très réel talent met à l’abri de ces mesquineries, avec la seule exception de Huguette Garnier, tous les confrères qui nous citent n’osent pas nous nommer…
Je ne vois là rien de personnel.
Ce qui les fait agir avec aussi peu de correction littéraire, témoigne d’un état d’esprit que j’ai noté chez plus d’un parmi nos contemporains…
« Ils y viennent tous », ai-je dit en parlant de la vogue d’occultisme qui sévit en littérature, au théâtre, au cinéma…
Oui, mais ils y viennent HONTEUSEMENT.
Cette sensibilité « D’OCCULTISTE HONTEUX », vous la trouvez aussi bien chez le Français moyen qui vous dit :
— Vous savez, moi aussi, je ne crois à rien… je ne suis pas superstitieux… Vos trucs me font rigoler. Je suis un esprit fort. Néanmoins, il m’est arrivé une aventure curieuse un jour… Ma tante venait de mourir. Je me trouvais seul dans ce château, en province… etc., etc…
… Et il vous conte une histoire à dormir debout, dont même un débutant en sciences occultes ne voudrait pas…
… C’est le même état d’esprit que je retrouve chez nos plagiaires…
Ils lisent CONSOLATION comme ils liraient une feuille pornographique : en se cachant. Ce qu’ils trouvent chez nous les troublent. Ils en perçoivent la vérité… Mais ils ne veulent pas en convenir. Alors, ils font dans leur journal une élucubration personnelle (ou qu’ils imaginent telle…). Et ils nous citent sans nous citer…
C’est pour cela que je ne leur en veux pas… personnellement…
… Et que je leur en veux davantage… en tant qu’occultiste franche et non honteuse.

Maryse Choisy

Le secret de Hitler

Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 31 (19 mars 1936) :

LE SECRET DE HITLER

Il n’est pas seul. Quand il parle et qu’on sent une diminution de vitalité, tout de suite, à la phrase suivante, il est regonflé.
C’est la chaîne magique qui lui donne ce magnétisme dans lequel se laissent prendre tous ceux qui l’approchent…
Il parle comme un occultiste :
« Je suis sur le chemin que le Destin m’a montré, avec la « certitude d’un somnambule ».
Il parle au nom du peuple allemand. Et c’est dans l’enthousiasme de ses partisans qu’il puise son énergie.
Je rapproche de cette magie opérative — et j’insiste sur ce mot — une anecdote politique qui appartient à la même catégorie de faits.
Un transfuge du parti communiste qui est aujourd’hui néo (je tais son nom par discrétion), me parlait récemment avec mélancolie de sa campagne électorale :
— C’est terrible… quand j’hésite, quand j’ai des doutes, mon éloquence tombe à plat… Jadis je me revivifiais (le mot est de lui) dans le Parti, qui semblait m’envoyer du fluide lorsque je faiblissais…
La vérité reste la même. C’est l’enthousiasme qui crée l’égrégore… Et l’égrégore nourrit ensuite chacun de ses croyants.
L’enthousiasme, la foi, voilà les matières premières de toute magie.
La crise dont nous souffrons le plus, en France, à l’heure actuelle, c’est la crise d’enthousiasme.

Maryse Choisy

Leurs superstitions

Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 30 (12 mars 1936) :

LEURS SUPERSTITIONS

Qu’est-ce que je vous disais ? Ils y viennent tous. Voilà que notre spirituel confrère G. de la Fouchardière se met à croire aux fantômes. Dans l’ŒUVRE, du 5 mars, il se moque avec beaucoup d’à-propos en répondant à l’enquête de l’INTRAN : « Êtes-vous superstitieux ? »
Nous sommes tout à fait de cœur avec lui lorsqu’il s’agit de critiquer ces petites croyances sans logique et sans tradition qu’adoptent tous ceux qui ne croient à rien.
Mais lorsqu’il passe dans le domaine sérieux, M. de la Fouchardière sait aussi nous donner le frisson. Oyez plutôt :

Il y a aussi les fantômes. Je crois aux fantômes.
J’ai vu les ombres mouvantes de gens qui étaient morts ; j’ai entendu leurs voix. Aujourd’hui, les fantômes ne hantent plus les vieux châteaux en ruines ; au cinéma, il sont modernes, dociles et permanents.
Et puis, je crois, puisqu’il faut parler sérieusement, à des forces naturelles et inconnues qui n’ont pas fini de nous étonner et qui sont en nous… Des forces peut-être inconscientes et dont nous sommes les jouets…
Il y a longtemps que Shakespeare a écrit cette phrase que citent toujours les Anglais mystiques et dont voici le début : « Il y a plus de choses, dans le ciel et sur la terre… »

Je salue en G. de la Fouchardière, sinon un converti à l’occultisme, du moins un écrivain intelligent.
Et un écrivain intelligent arrive toujours à avoir un interview de la réalité.

Maryse Choisy

Ils y viennent tous…

Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 29 (5 mars 1936) :

ILS Y VIENNENT TOUS…

Après le cinéma, le théâtre. Nous avons au moins trois pièces en ce moment, à Paris, qui s’occupent des questions supra-terrestres : LA FOLLE DU CIEL, une fantaisie norvégienne sur les mouettes, la revue sur le spiritisme de Rip, et EUROPE, de Maurice Rostand, où l’on voit Sainte-Thérèse de Lisieux en personne, empêcher M. Hitler de faire la guerre.
Je ne veux point ici critiquer les qualités et les défauts d’EUROPE. Une pièce de Maurice Rostand contient toujours quelques beaux vers. D’ailleurs, notre ami et collaborateur J. B., analysera cette pièce pour vous, ici même, la semaine prochaine. Je me contente simplement de marquer le coup. EUROPE développe — consciemment ou inconsciemment — une théorie chère aux occultistes. On peut faire venir une guerre à force d’en parler. On peut aussi détourner une guerre en formant un eggrégore de paix. Les pensées que l’homme émet créent le moule de son avenir.
Penser correctement, tout est là.
Et c’est là le premier enseignement d’un occultiste…

Maryse Choisy

Réincarnation

Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 23 (23 janvier 1936) :

RÉINCARNATION

Il n’est point de saison morte pour la vie spirituelle. La leçon de janvier, c’est que la Nature laisse les portes ouvertes tout l’hiver et que même les averses glacées et les gelées noires sont des bénédictions.
Notre acte le plus insignifiant peut préparer notre vie future. Et si nous avons rarement abordé ici le sujet de la réincarnation, c’est qu’il règne un grand malentendu pour les égocentristes. Le karma n’est pas cette chose anthropomorphique que nous imaginons. Les résultats de nos actions sont des impressions, des dispositions. Ce n’est pas en nous grisant une fois — si exagérément que cela soit — que nous devenons alcooliques, mais en buvant tous les jours, que notre constitution psycho-physiologique s’altère par l’absorption de l’alcool. Ainsi une seule mauvaise action (encore qu’elle puisse avoir des conséquences malheureuses en vertu du choc en retour) ne détermine point notre caractère présent ou futur. Ce n’est que lorsqu’un individu agit tous les jours à la manière d’un porc ou d’un chien qu’il développe des dispositions de porc ou de chien, et que, dans une future migration, son corps subtil, attiré par le magnétisme des tendances communes, se réincarnera dans le corps d’un porc ou d’un chien. C’est toujours l’histoire de la proverbiale goutte d’eau qui, en tombant pendant des millions d’années sur un même rocher, y laisse une IMPRESSION. Ces dispositions résultant de certaines actions habituelles peuvent, soit demeurer longtemps à l’état latent et former la mémoire ou ce que nous appelons les tendances innées d’un individu, soit s’extérioriser dans le génie particulier de sa réincarnation en homme, oiseau, vache, brahmane ou paria ou dans l’époque et le lieu caractéristique de sa naissance. Ils peuvent être ignorés pendant de nombreuses années de l’individu lui-même, car les désirs et les craintes ne se manifestent à la surface que lorsqu’ils rencontrent les images et les objets particuliers qui sont à craindre ou à désirer. Mais ces dispositions ne s’annihilent pas entièrement toutes seules. Ainsi elles sont capables de rester à l’état virtuel, durant toute l’existence d’un Brahmane et apparaître de nouveau dans une future incarnation canine.
Pourquoi faut-il, après avoir été saint et avant d’être ange, devenir chien ?
Punition ? Non. Purgation.

Maryse Choisy

Mental et Spirituel

Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 22 (16 janvier 1936) :

MENTAL ET SPIRITUEL

J’assistais récemment à la discussion du budget d’une de mes amies qui, malgré la crise, possède des revenus coquets et qui se pique d’une teinture d’occultisme.
Elle raisonnait fort sérieusement de la façon suivante :
— Ça m’ennuie, soupirait-elle. Mais j’ai décidé de donner ces cent francs à l’œuvre que vous m’avez recommandée. Je suis sûre que ça sera excellent pour mon salut. Cent francs, c’est beaucoup par le temps qui court ! Mais enfin il faut ce qu’il faut !
Voilà une générosité certainement, mais signée non moins certainement du mental. Elle était calculée avec cette précision qu’on retrouve dans les livres de comptes des fonctionnaires honnêtes. Que je préfère à ces cent francs le sous donné SPONTANÉMENT ET DE TOUT CŒUR !
Mais ce n’est pas seulement dans la charité, c’est dans tous les actes de la vie qu’on doit retrouver le motif SPIRITUEL et non pas MENTAL. Au bigot, qui va tous les jours à la messe et agit vilainement, je préfère mille fois l’athée impénitent, le laïque qui fait le bien, qui se dévoue sans égoïsme et sans arrière-pensée de paradis futurs qui le payeront ! Le croyant théorique est mental. Le bienfaiteur laïque est spirituel MALGRÉ LUI. Et cela, c’est vrai, surtout en occultisme. Qu’importe que tel savant ait lu des grimoires rares, des gros volumes d’astrologie ! qu’importe qu’il connaisse tous les traités de magie par cœur ! Les livres n’ont pénétré que son mental. S’il n’a pas subi de profondes modifications dans son corps et dans son cœur, il ignore tout de la vie spirituelle. Ce n’est pas un occultiste.
Déjà saint Paul l’avait dit : « ET TOUT CE QUE VOUS FEREZ N’EST RIEN SANS LA CHARITÉ. » C’est-à-dire sans l’amour. C’est-à-dire sans le CŒUR.

Maryse Choisy

Joyeux Noël

Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 19 (26 décembre 1935) :

JOYEUX NOËL

C’est l’heure, mes amis et amies inconnues, où je me sens pleine d’amour pour vous, tous et toutes. Noël, c’est notre fête à nous occultistes, mystiques et chrétiens, n’est NOTRE fête par excellence.
Je voudrais que ce message d’amitié vous trouvât dans un foyer tiède, l’esprit calme et le cœur pur.
Notre ami J. B. vous révèle plus loin le sens caché de la fête de Noël. C’est la base même de tout ésotérisme. C’est la naissance d’une lumière, la naissance d’un feu.
Je me contenterai simplement de vous souhaiter beaucoup de bonheur et de vous envoyer mes plus fortes vibrations de sympathie.
En cette fin d’année, on se recueille. On fait son bilan moral et sentimental.
Je m’aperçois, amis et amies inconnues, que je vous dois tant de choses ! Si CONSOLATION a pu vous enseigner la moindre parcelle de vérité, j’ai appris, moi aussi, beaucoup en lisant vos lettres si amicales, si encourageantes et en réfléchissant sur vos questions. L’élève est le vrai initiateur… C’est lui qui vous donne le courage de continuer un chemin quelquefois difficile.
Merci à vous tous et toutes de nous avoir soutenu dans nos efforts. Merci de tout mon cœur !.

Maryse Choisy

Désocculter l’occulte

Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 18 (19 décembre 1935) :

DÉSOCCULTER L’OCCULTE

Mon désir intense serait de plaire à tous mes lecteurs qui sont, tous, mes amis au même degré.
Mais que cela paraît donc difficile !
L’un me reproche une certaine confusion… Je crains fort que cette confusion existe surtout dans son esprit ! Car nous avons soin de présenter ici chaque matière séparément, d’une façon claire et précise. Et nous graduons notre enseignement du plus facile au plus difficile.
Un autre lecteur m’en veut de désocculter l’occulte. J’ai déjà répondu à cette objection dans des numéros précédents. Mais je crois que la meilleure réponse au reproche de mon second lecteur c’est le reproche du premier.
La preuve qu’on peut tout dire, réside justement en cela : que ceux qui ne doivent pas comprendre, ne comprennent pas. L’enseignement occulte a ceci de merveilleux : c’est qu’il crée la confusion dans les cerveaux qui ne sont pas prêts à le recevoir.
Alors pourquoi désocculter l’occulte ? Parce que, comme l’a très bien démontré ici notre ami Fernand Divoire, on ne saurait atteindre à l’initiation seul, sans un maître qui vous montre la voie, et parce qu’il y a des hommes initiables et qui cherchent la Voie et le Secret.
C’est pour ces hommes de bonne foi que nous avons, avec J. B., créé l’A.R.O.T. (l’Association pour la Rénovation de l’Occultisme Traditionnel), dont notre excellent collaborateur vous a déjà parlé ici même.
Dussions-nous ne montrer le chemin qu’à un seul initiable, que notre œuvre ne serait pas inutile !

Maryse Choisy

Qu’est-ce que la voyance ?

Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 17 (12 décembre 1935) :

QU’EST-CE QUE LA VOYANCE ?

Ne confondons point. La voyance — la vraie — est un très noble don. Dans ce numéro de Neptune, où l’on vous parle de miroirs magiques, des gadaniés, des cartes et de la musique, le lecteur non initié aura peut-être quelque difficulté à saisir le fil neptunien qui les relie tous…
…Et cependant tout cela est une même et seule chose. Faut-il vous reparler des trois plans si admirablement traités par J. B. (1) ? Tout ce qui se crée naît d’abord sur le plan divin, puis involue sur le plan astral et le plan physique. Saint Jean et Nostradamus entendent sur le plan divin et voient très loin… La cartomancienne du coin voit sur le plan astral des clichés, des images qui sont dans un futur proche…
Plus on monte, moins il y a d’images… Il est un moment où on n’entend que des sons purs, des vibrations… Les grands musiciens sont des clairaudients. Regardez le visage de Beethoven : un pur neptunien.
C’est tout cela que nous voulions vous exposer dans ce numéro… Excusez-nous, s’il est quelque peu aride… Mais toutes les choses vraiment initiatiques sont difficiles à exprimer dans un vocabulaire fait pour des nourritures terrestres.
Si j’ai pu éveiller des résonances en vous, développer les facultés naturelles de voyance chez quelques-uns d’entre vous, si peu nombreux soient-ils, je m’en estimerai fort heureuse.

(1) Voir Consolation n° 6.

Maryse Choisy

La Politique de l’Esprit

Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 16 (5 décembre 1935) :

LA POLITIQUE DE L’ESPRIT

Nous nous sommes jusqu’ici strictement abstenu de faire de la politique dans ce journal.
La place de l’occultiste vrai est dans son cabinet ou dans son laboratoire et non pas dans la rue.
Néanmoins, quand il s’agit d’une offense portée à la vie spirituelle, nous nous reconnaissons le droit de dire notre avis.
Un étudiant se plaint dans une de ses lettres :
« LE PRIX DES INSCRIPTIONS À LA FACULTÉ A SENSIBLEMENT AUGMENTÉ. ON VEUT RÉDUIRE LE CHÔMAGE DES INTELLECTUELS EN ÉLIMINANT LES PAUVRES. POURQUOI N’ÉLIMINERAIT-ON PAS D’ABORD LES IMBÉCILES ? CE SERAIT SI FACILE PAR UN EXAMEN SÉVÈRE OU UN CONCOURS. »
Je ne puis que donner raison à mon lecteur. Une société — qu’elle soit démocratique ou oligarchique — ne peut que gagner en vitalité lorsqu’elle accorde aux meilleurs d’entre eux la possibilité d’occuper des places auxquelles leurs aptitudes les destinent.
Quant à nous, occultistes, nous ne pouvons que protester lorsque l’esprit est désavantagé en face de l’argent. Platon, qui était un grand initié, était dans la vraie tradition quand il écrivait qu’une république idéale devait être gouvernée par un philosophe.

Maryse Choisy