Éditorial de Maryse Choisy paru dans Consolation n° 30 (12 mars 1936) :
LEURS SUPERSTITIONS
Qu’est-ce que je vous disais ? Ils y viennent tous. Voilà que notre spirituel confrère G. de la Fouchardière se met à croire aux fantômes. Dans l’ŒUVRE, du 5 mars, il se moque avec beaucoup d’à-propos en répondant à l’enquête de l’INTRAN : « Êtes-vous superstitieux ? »
Nous sommes tout à fait de cœur avec lui lorsqu’il s’agit de critiquer ces petites croyances sans logique et sans tradition qu’adoptent tous ceux qui ne croient à rien.
Mais lorsqu’il passe dans le domaine sérieux, M. de la Fouchardière sait aussi nous donner le frisson. Oyez plutôt :Il y a aussi les fantômes. Je crois aux fantômes.
J’ai vu les ombres mouvantes de gens qui étaient morts ; j’ai entendu leurs voix. Aujourd’hui, les fantômes ne hantent plus les vieux châteaux en ruines ; au cinéma, il sont modernes, dociles et permanents.
Et puis, je crois, puisqu’il faut parler sérieusement, à des forces naturelles et inconnues qui n’ont pas fini de nous étonner et qui sont en nous… Des forces peut-être inconscientes et dont nous sommes les jouets…
Il y a longtemps que Shakespeare a écrit cette phrase que citent toujours les Anglais mystiques et dont voici le début : « Il y a plus de choses, dans le ciel et sur la terre… »Je salue en G. de la Fouchardière, sinon un converti à l’occultisme, du moins un écrivain intelligent.
Et un écrivain intelligent arrive toujours à avoir un interview de la réalité.Maryse Choisy