Dans son livre Douze femmes remarquables (Regard & Voir, 2013), Marc-Alain Descamps se propose de présenter quelques femmes rencontrées sur son long chemin de spiritualité et de pratique du yoga : de H.P. Blavatsky à Amma (Swami Amritanandamayï) en passant par Cajzoran Ali, Marie-Magdeleine Davy, Elisabeth Kübler-Ross, Lilian Silburn, etc., dont, sujet qui nous intéresse spécialement ici, Maryse Choisy.
L’auteur, « professeur de psychologie, de yoga et psychanalyste de rêve éveillé », ayant rencontré Maryse Choisy ; le livre, « version remaniée et augmentée » d’une première édition de 2006 : tout concourt à nous placer dans l’attente d’un travail sérieux.
Malheureusement, concernant Maryse Choisy, il n’en est rien et nous pouvons même affirmer que le chapitre qui lui est consacré est un désastre.
La majeure partie de ces seize pages ne paraît être qu’une prise de notes d’un cancre à partir de la lecture des mémoires de Maryse Choisy. Tout cela est bien mal résumé, sans aucun effort de style et, même, de compréhension : du simple recopiage de certains passages, sans distanciation.
Il y a pire encore : de trop nombreuses erreurs, que nous pouvons nous amuser à relever, comme nous l’avions fait pour la préface de Julia Bracher à la réédition d’Un mois chez les filles.
• « Après son rêve déçu et son deuil, en 1925, elle veut être psychanalyste […] Elle a vingt-deux ans et part en Autriche s’installer à Vienne. […] Toute sa vie elle exercera comme psychanalyste. »
Devenir psychanalyste n’est absolument pas le but de Maryse Choisy à vingt-deux ans. C’est beaucoup plus simplement pour guérir un mal-être que, sur un coup de tête, elle aurait pris le train pour rencontrer Freud : elle ne s’installe pas à Vienne, dont elle serait revenue très vite (encore une fois, il serait bon de considérer avec plus de scepticisme cette rencontre). Quant à la question de l’exercice de la psychanalyse par Maryse Choisy, il est bien mystérieux et ne concernerait que peu d’années à partir de la fin des années 40.
• « Colette est sa marraine »
Maryse Choisy n’a pas parlé de Colette comme d’une marraine littéraire, comme ce fut le cas pour Rachilde. En revanche, Colette fut la marraine, au sens religieux, de la fille de Maryse Choisy, elle-même nommée Colette.
• « Plus tous les surréalistes : Picabia, Caruzo, Paul Fort, Marinetti… »
Ces noms sont effectivement cités (moins la faute d’orthographe) dans Mes enfances. Si Maryse Choisy a croisé ces hommes, ce n’est pas, comme Marc-Alain Descamps le laisse entendre, vers 1925, mais alors qu’elle était enfant, dans le salon de sa tante Anna. On s’amuse surtout de voir ces noms hétéroclites cités sous la bannière du surréalisme…
• « Pendant ce temps, elle multiplie les revues, 1927 La Chirologie, Votre Destin, Votre Bonheur, 1935 Consolation… »
La Chirologie est un essai, non une revue de Maryse Choisy.
• « Elle y publie […] des articles de Kerneiz, de Cajzoran et de Fernand Rivoire »
C’est bien évidemment Fernand Divoire qu’il faut lire.
• « Jacques Lacan a écrit ses premiers textes dans cette revue Psyché. »
Quand Jacques Lacan rencontre pour la première fois Maryse Choisy en 1953, cela fait déjà plus de vingt ans qu’il a commencé à se faire connaître. D’autre part, il n’a jamais écrit dans Psyché.
Je m’arrête là. Il y aurait également des approximations à relever, dont certaines ont déjà été commentées quant à la préface de Julia Bracher.
Le chapitre est cependant intéressant, si l’on peut faire confiance à l’auteur sur ce point, pour les quelques souvenirs du salon de Maryse Choisy qu’il fréquentait dans les années 50.
Précisons pour finir que le chapitre également consacré à Maryse Choisy, dans un autre livre de Marc-Alain Descamps, Histoire du hatha-yoga en France, passé et présent (Almora, 2011), est la copie, mais à l’ordre des phrases réarrangé, de celui que nous venons de commenter.